La solution

Avec une nouvelle perspective sur la gestion des fichiers en entreprise, nous pouvons désormais passer à l'action. Il est temps de mettre de l'ordre, découvrons comment.

11/23/20239 min read

transition d'un chaos de livres à l'ordre dans une bibliothèque
transition d'un chaos de livres à l'ordre dans une bibliothèque

Solutionner le vrac et l'obésité numérique apporterait de nombreux avantages et éliminerait de nombreux inconvénients : c'est pourquoi cette démarche est si importante. Pour y arriver, je vous ai proposé une autre perspective pour considérer la gestion des fichiers. Et maintenant, qu'est-ce qu'il faut faire concrètement ?

La première chose à avoir à l'esprit, c'est qu'il va y avoir des actions nécessaires à l'échelle de l'entreprise, et des actions nécessaires à l'échelle des salariés. Cela étant dit, le périmètre d'action des salariés restera logiquement très limité tant que l'entreprise n'aura pas défini le cadre et les règles à respecter - il est inconcevable d'attendre d'eux qu'ils définissent pour tout le monde les "bonnes" règles à suivre. Il faut donc commencer par définir ce cadre.

Notes :

  1. Il est important de noter qu'il est indispensable pour une entreprise d'avoir une solution GED (Gestion Electronique de Documents). Microsoft SharePoint, par exemple, est une solution largement utilisée dans les entreprises. Une GED permet de stocker des fichiers, de les organiser et de faciliter la recherche des documents. De ce fait, cette solution permet de manipuler et de renseigner plus facilement les fichiers, ce qui en fait un impératif pour la gestion documentaire.

  2. Nous parlons de dossiers, mais tout type de conteneur est concerné (en incluant les groupes sur Microsoft Teams).

A l'échelle de l'entreprise

Règles de base

Pour permettre aux salariés de contribuer de manière saine à la gestion documentaire, l'entreprise doit définir un certain nombre de choses. Tout d'abord, elle doit définir des standards et des règles vis-à-vis des caractéristiques des fichiers. Quelles sont les informations de base que doit avoir un fichier pour permettre de l'identifier ? Comment doit-il être nommé ? Comment et où doit-il être rangé ? Doit-il être protégé et si oui, comment ?

Ensuite, des règles doivent être établies concernant le cycle de vie des fichiers. Comment créer et modifier un fichier en respectant le cadre ? Combien de temps doit-il être conservé ? Devra-t-il être archivé ou supprimé ? Comment savoir si un fichier peut être supprimé ? Toutes ces questions doivent être traitées au regard des besoins spécifiques de l'entreprise, qui dépendent de la nature de ses activités, de ses processus métiers et des exigences réglementaires auxquelles elle est soumise.

Par ailleurs, il va falloir considérer les règles à mettre en place concernant les dossiers et l'arborescence de manière générale. Bien que les moteurs de recherche interne soient très utiles, l'arborescence des dossiers garde un intérêt car elle permet de regrouper les fichiers ayant trait à un sujet commun, avec une logique propre au sujet en question. Par exemple, une équipe doit avoir un espace où ranger les documents qu'elle utilise au quotidien. Ceux-ci doivent être répartis dans des sous-dossiers selon l'activité qu'ils concernent, ou encore selon leur nature (documents de présentation de l'équipe, documents de travail, ressources, etc.). Les dossiers ont un pouvoir relativement important (et on peut l'oublier) par le fait qu'ils sont la porte d'entrée vers les fichiers qu'ils contiennent : en parcourant l'arborescence, on navigue selon les noms des dossiers. Un dossier dont le nom n'est pas explicite, ou qui n'a pas d'utilité définie (comme un fourre-tout) dessert son contenu et complexifie la recherche. C'est pourquoi le cadre doit donner des indications sur comment créer, nommer, modifier et supprimer les dossiers.

En résultat de tout ce travail : l'entreprise a désormais sa politique documentaire numérique.

Document sur une table
Document sur une table
Modalités d'application

Une fois que des réponses ont été trouvées, il faut se pencher sur l'aspect pratique : comment ces standards et règles doivent-ils être appliqués concrètement ? C'est là où la technologie entre en jeu : les solutions GED vont permettre de faciliter l'application de certaines règles grâce à leur fonctionnalités, comme par exemple la classification, la gestion de la conservation et de la suppression, etc.

Maintenant, au-delà de l'application pratique, il est impératif de clarifier les processus et procédures, et les rôles et responsabilités de tous. Autrement dit : qui doit faire quoi, quand et comment ? C'est une étape particulièrement importante car elle est le gage de la réussite de la mise en place du cadre. Si les rôles ne sont pas clairs, cela risque de créer des conflits ("ce n'est pas à moi de supprimer les fichiers de mon équipe qui ne nous servent plus"). Et si les procédures ne sont pas claires, le cadre aura peu de chances d'être bien appliqué ("comment peut-on vérifier que nos documents sont conformes ? Quand est-ce qu'on doit le faire ?"). Le doute, bien souvent, mène à l'inaction.

Comme évoqué dans l'article précédent, il est fondamental de prendre en compte que chacun a un rôle à jouer. L'ordre dans un espace commun ne peut pas être la préoccupation d'une poignée de personnes, car il est de la responsabilité de tous, puisqu'on l'impacte tous. Pour faire un parallèle avec une situation plus "visible", imaginons que l'on n'ait pas d'ordinateur et que l'on utilise uniquement des feuilles et des dossiers en carton. Si chacun posait un peu n'importe où ses documents, et ne les triait pas systématiquement, on aurait rapidement un problème d'ordre dans le bureau et cela serait ingérable. Par ailleurs, il serait insensé de demander à un petit groupe de personnes de faire le travail, car elles ne sauraient pas décider ce qu'il faut faire de chaque élément, et elles finiraient par devoir demander aux personnes qui l'utilisent (ce qui rendrait leur rôle absolument inutile). C'est la même chose dans le monde "virtuel".

Cela étant dit, il paraît nécessaire qu'il y ait également des référents sur le sujet. D'abord parce que l'application du cadre va amener des doutes et des questions (comme pour n'importe quelle autre activité que l'on demande de réaliser), ce qui nécessite d'avoir un interlocuteur disponible, et ensuite parce qu'il faut que le sujet soit suivi. Sans suivi, il est impossible d'avoir une appréciation de la situation ou de son évolution (au niveau de l'application du cadre), et encore moins de pouvoir l'améliorer.

Pour parler de l'aspect temporel, il va sans dire que des "petites actions" réalisées régulièrement valent bien plus que quelques actions "coup de poing" de grande ampleur. Tout comme il est nécessaire de nettoyer les locaux d'une entreprise tous les jours, il est nécessaire de traiter adéquatement ses fichiers et l'espace de stockage tous les jours. Pour faciliter l'application du cadre, de bonnes habitudes doivent donc être prises. Pour instaurer ces habitudes, l'entreprise doit accompagner ses salariés pour leur permettre de les incorporer facilement dans leur journée de travail.

Enfin, des temps clés doivent être définis pour revoir en profondeur l'organisation dans le cloud afin de traiter les sujets plus complexes : les dossiers que l'on utilise sont-ils toujours pertinents ? Faut-il revoir l'arborescence ? Certains fichiers devraient-ils être déplacés ailleurs ? Etc. Certains évènements ont notamment un enjeu particulièrement important au regard de la gestion documentaire : quand un projet finit, quand une nouvelle activité est lancée, quand un salarié quitte une équipe, voire quitte l'entreprise, etc. Dans ces moments-là, une attention supérieure doit être portée aux fichiers, afin de s'assurer de laisser les choses en ordre, ou au contraire de mettre en place des conditions favorables à leur gestion future.

Atelier avec une femme montrant un post-it au tableau
Atelier avec une femme montrant un post-it au tableau
Remettre à zéro et repartir du bon pied

Jusque là, la politique documentaire et l'organisation lui permettant d'être appliquée ont été définies. Maintenant, pour partir sur des bases saines, il faut évidemment revoir l'existant. Cela implique de faire du tri dans les fichiers stockés, et de mettre en conformité les fichiers restants pour qu'ils respectent le cadre. Cela implique également de repenser son plan de classement, soit la manière dont l'arborescence des dossiers a été structurée, pour éventuellement la réformer au regard des nouvelles règles. En résultat : une base propre, qu'il s'agit désormais d'entretenir.

Mais pour cela, et c'est là où tout se joue, il faut que les salariés soient de la partie. Il est absolument indispensable de commencer par les sensibiliser afin qu'ils prennent conscience des impacts et enjeux de la gestion documentaire. Rappelons-nous que plusieurs facteurs compliquent cette prise de conscience, comme nous l'avons vu dans cet article. Une fois le cadre défini, il faudra également les former pour qu'ils puissent le comprendre et l'appliquer comme souhaité, et leur mettre à disposition toute la documentation nécessaire. La conduite du changement, comme on appelle ce processus, n'est pas une formalité. La résistance au changement et le manque d'adhésion des salariés mènent bien souvent à l'échec [1] et pour cause : ils sont au cœur de la solution, et s'ils ne voient pas l'utilité ou s'ils ne comprennent pas ce qui leur est demandé de faire, il va être très difficile d'attendre d'eux qu'ils agissent comme espéré.

Entretenir au travers du temps

Si l'entreprise définit son cadre, fait une remise à zéro, mais ne suit pas le sujet de près dans la durée, il est logique que le problème réapparaisse. En l'espace de quelques temps, les non-conformités finiront par resurgir et le tout s'amplifiera jusqu'à retourner à l'état initial. Back to the start !

Comme évoqué brièvement, il est donc nécessaire de suivre le sujet. Pour cela, et avant de définir quoi que ce soit, il est crucial de mettre en place un comité de suivi, auquel doivent participer des représentants des corps de métier dont les activités impactent la gestion documentaire : service archive, service juridique, délégué à la protection des données (DPO), etc. Il doit également comprendre les référents sur le sujet de la gestion documentaire numérique - ce sont eux qui seront les interlocuteurs de proximité et qui permettront de faire remonter les problèmes de fond. Dans un second temps, il s'agit de définir des objectifs, avec des indicateurs, du reporting et des audits permettant de mesurer le niveau de conformité et son évolution. Enfin, des instances de suivi permettront d'évaluer la situation et de pouvoir réajuster le cadre si besoin, dans une logique d'amélioration continue.

Pour conclure sur cette partie, il s'agit, en somme, de mettre en place un programme de Gouvernance de l'Information.

A l'échelle du salarié

Nous avons vu en quoi le rôle du salarié est crucial : c'est nous tous qui connaissons nos fichiers, leur utilité, leur importance, etc. Le cadre et l'organisation étant définis, nous pouvons désormais faire notre part facilement car la route est tracée.

Au-delà d'apprendre le cadre et de l'appliquer, nous devons tout simplement nous poser des questions sur ce que l'on fait : le nom de mon fichier est-il suffisamment explicite ? L'endroit où il est rangé est-il logique ? Est-ce que ce dossier est utile ? Quels sont les fichiers dont je n'ai plus besoin ?

En définitive : penser plus large et plus long terme. Et se rappeler : "Un pour tous, et tous pour un".

En conclusion

Créer un terreau fertile pour une bonne gestion documentaire est de la responsabilité de l'entreprise. Celle-ci doit commencer par définir tous les standards et toutes les règles nécessaires pour clarifier les attentes au niveau des fichiers et des dossiers. Une fois la politique documentaire définie, l'organisation associée doit être préparée en clarifiant les modalités d'application de cette politique, la gestion au niveau temporel ainsi que les rôles et responsabilités de chacun. Les salariés doivent être sensibilisés et formés afin de leur donner les moyens de contribuer de manière constructive. Il est alors nécessaire de faire une remise à zéro du cloud, en supprimant les fichiers inutiles, en mettant en conformité ceux qui sont conservés, et en révisant la structure de l'arborescence. Enfin, pour assurer la pérennité du travail effectué, il est indispensable de suivre le sujet de près, en ayant mis en place une gouvernance et un suivi régulier. C'est grâce à tout cela que l'on pourra mettre fin au vrac et à l'obésité numériques.

Salariée sur son ordinateur
Salariée sur son ordinateur